Titre étrange pensez-vous ? Pourtant, les créateurs de ChatGPT ont démontré qu’ils comprenaient parfaitement les enjeux du marché en pleine explosion des modèles d’intelligence artificielle. Leur API abordable et monétisable, annoncée ce printemps, pourrait changer la donne.
Bien que ChatGPT mobilise 80% de la couverture médiatique du moment, il faut bien se rendre compte qu’OpenAI n’est pas seul sur ce créneau et que les autres « géants » du web fourbissent leurs armes pour une réplique imminente.
La guerre des géants de la technologie pour l’IA
OpenAI a certes gagné une bataille, celle du parfait timing qui transforme une innovation de laboratoire en usage grand publique. Une innovation, un usage, un public, et le bouche à oreille a fait le reste.
Mais ni Baidu, ni Google ne vont se laisser distancer.
Du côté d’Alphabet, la maison mère de Google, on vient d’annoncer « Bard», capitalisant sur les avancées initiées par GoogleAI et Deepmind et utilisant la dernière intelligence conversationnelle (LaMDA). Orienté recherche sur le web, ADN de google, il se positionne en concurrent direct de ChatGPT. Espérons qu’il soit un peu plus fort en math que ce dernier !
Coté Asie, Baidu ne va pas tarder à publier 2 outils de la famille ERNIE, en concurrence direct des IA génératives de dessins/photos comme Dall-E pour ERNIE-ViLG. AliBaba n’est pas loin derrière avec son propre chatbot de type ChatGPT.
Disons-le clairement, au-delà des échantillons d’entrainement et des contraintes d’évitement des biais ; la bataille se gagnera sur la capacité d’intégration de ces agents conversationnels et génératifs dans les processus métier ou les parcours de vie.
Microsoft l’a bien compris, puisqu’après avoir injecté plusieurs milliards dans OpenAI, il vient d’annoncer le petit frère de feu Cortana, basé sur ChatGPT, et qui permettra aux professionnels d’obtenir un compte-rendu de réunion automatique à la fin d’une réunion Teams.
Ouvrir les capacités d’IA via les API
Au-delà de la capacité à rendre « utile » cette IA en l’exposant sous forme d’API et en l’introduisant dans des processus existants, c’est surtout la capacité de monétiser directement cette IA qui pousse les éditeurs à la proposer sous forme d’API.
À partir de là, les développeurs peuvent créer leurs propres applications ou produits alimentés par l’IA, ou les utiliser pour améliorer des produits ou services existants. Beaucoup le font déjà, en explorant ces capacités pour prendre de l’avance sur la vague de l’IA :
- API de traitement du langage naturel (NLP) : De nombreuses entreprises utilisent les API NLP pour analyser les commentaires et les évaluations des clients, automatiser les interactions avec le service client et améliorer les chatbots et les assistants virtuels.
- API de reconnaissance d’images : Les API de reconnaissance d’images sont utilisées par les entreprises de commerce électronique pour identifier et recommander des produits en fonction du contenu généré par les utilisateurs, comme les images et les vidéos. Les plateformes de réseaux sociaux peuvent utiliser des API de reconnaissance d’images alimentées par l’IA pour améliorer leur fonction d’étiquetage des photos.
- API de reconnaissance vocale et de synthèse vocale : Les entreprises utilisent ces API pour développer des interfaces vocales pour leurs produits et services, tels que des assistants à commande vocale et des agents virtuels.
- API d’analyse prédictive : les entreprises exploitent les API d’analyse prédictive pour analyser de grands volumes de données et faire des prédictions sur les tendances futures et le comportement des clients. Ces informations peuvent être utilisées pour améliorer les campagnes de marketing, optimiser les chaînes d’approvisionnement et prendre de meilleures décisions commerciales.
- API d’analyse des sentiments : elles aident les entreprises à comprendre les opinions et les émotions des clients à l’égard de leurs produits et services, ce qui leur permet d’adapter leurs efforts de marketing et de service à la clientèle en conséquence.
Ces API d’IA – et d’autres cas d’utilisation qui restent à découvrir – offrent aux entreprises un moyen puissant d’exploiter les technologies d’intelligence artificielle sans avoir à investir dans un développement et une expertise internes coûteux.
La monétisation : l’ultime frontière
L’accès aux modèles et algorithmes d’IA via des API permet aux développeurs de créer leurs propres applications ou produits alimentés par l’IA, certes, mais les fournisseurs de ces API ont la possibilité de les commercialiser et de les monétiser. C’est là que réside la véritable valeur.
L’innovation ouverte boostée par l’IA passera une fois de plus par l’exposition d’une API, mais pas une API technique ; un vrai produit digital qui pourra être consommé par tous les développeurs du monde pour booster leurs services digitaux. Et une fois de plus, c’est la capacité marketing à distribuer ce produit digital qui fera la différence.
L’offre d’API sur des marketplaces permet aux développeurs et aux entreprises de trouver et d’intégrer plus facilement les outils alimentés par l’IA dont ils ont besoin, ce qui favorise l’adoption des API. La monétisation peut prendre la forme d’une redevance pour l’utilisation de l’API, basée sur des facteurs tels que le nombre d’appels à l’API ou la quantité de données traitées, bien qu’il existe également d’autres modèles de monétisation indirecte.
En mars, OpenAI a tiré la prochaine salve sur le front de la monétisation, en publiant les API ChatGPT et Whisper qui rendent les technologies plus faciles à intégrer et suffisamment abordables pour prendre en charge de nouveaux cas d’utilisation. OpenAI affirme avoir réussi à réduire de 90 % le coût de ChatGPT depuis décembre 2022 grâce à une série d’optimisations à l’échelle du système, ce qui lui permet de répercuter ces économies sur les utilisateurs de l’API.
Cet accès élargi conduira sans aucun doute à une adoption plus large ; OpenAI a pris son précieux modèle NLP et, capitalisant sur sa nouvelle popularité, l’a intégré dans un produit API qui générera de nouveaux revenus et stimulera l’innovation.
C’est tout l’objectif des « marketplace de services digitaux » (DSM), comme Amplify Enterprise Marketplace, proposé par Axway – de faire la différence entre un simple actif numérique (API) et un véritable produit numérique. Les entreprises-plateformes ont déjà de nombreux éléments essentiels en production, mais c’est la consommation de ces actifs numériques qui révèle leur véritable valeur.
La plateforme de commerce électronique Shopify a déjà annoncé une fonction de recherche alimentée par l’API ChatGPT pour son application Shop, et une plateforme de livraison de produits d’épicerie et de médias sociaux a fait de même avec ses propres implémentations de l’API.
Quelques réflexions finales sur la révolution de l’IA
Il y a un parallèle entre ces progrès de l’IA et la révolution de l’automobile, qui a été menée par le moteur à combustion interne. Dans les deux cas, il s’agissait au départ de processus complexes réservés aux techniciens (mécaniciens, scientifiques des données), qui se sont ensuite démocratisés pour devenir des outils facilement manipulables par le grand public.
Aujourd’hui, la plupart des gens conduisent des voitures sans rien savoir d’un mélange stœchiométrique ou d’une avance à l’allumage… de la même manière, grâce aux API pour l’IA, nous pouvons utiliser ChatGPT sans comprendre le fonctionnement d’une machine de Turing.
Ce qui peut être effrayant, c’est l’autonomisation de ces innovations : une voiture autonome peut être cool et même promettre d’énormes avantages en termes de sécurité et d’efficacité, mais les véhicules autonomes n’ont pas encore été adoptés en masse en raison de problèmes persistants en matière de responsabilité, de réglementation et de sécurité. Et une IA autonome, qui peut guider la connaissance, nous rappelle rapidement HAL, 1984 ou Terminator.
Certains tirent déjà la sonnette d’alarme sur l’utilisation non autonome de l’IA. OpenAI, pour sa part, n’est pas restée insensible aux préoccupations en matière de sécurité et de protection de la vie privée, annonçant le mois dernier la possibilité pour les utilisateurs de désactiver l’historique des conversations. Il reste à voir comment nous ferons face à ces dilemmes éthiques.
Ce qui est clair, en revanche, c’est que les acteurs qui pourront faire la différence entre l’IA en tant que capacité technique, et l’IA en tant que produit numérique – qui nécessite son propre marketing comme tout autre produit – sont ceux qui gagneront la bataille de la monétisation de l’IA.
CTA : Emmanuel Methivier et d’autres experts commerciaux, industriels et technologiques d’Axway dressent un tableau des tendances les plus fortes et des questions les plus urgentes auxquelles nous ferons face en 2024.
https://resources.axway.com/open-everything/guide-2024-digital-trends